Il existe déjà des tromperies et de multiples accrocs dans d’autres applications du rapport entre inflation et points. Si l’on prend l’exemple des fonctionnaires, leur point d’indice est gelé depuis une dizaine d’années. Il y a pire, les enseignants qui avaient bénéficié d’un engagement du précédent gouvernement se sont vu refuser les augmentations de traitement prévues. Ils ont eu droit dès l’arrivée du nouveau pouvoir à deux cadeaux : refus d’appliquer les engagements des prédécesseurs et décision de maintenir la désindexation par rapport à la hausse du coût de la vie.
Dans cet exemple, on constate qu’un gouvernement peut ne pas respecter les engagements de ses prédécesseurs. En déclarant que la valeur future du point des retraites sera indexée, le Gouvernement oublie ses mensonges et omissions passées consécutives à sa venue au pouvoir. Or plus la grève dure et plus la diffusion de l’information concernant la façon dont les indexations prévues pour les fonctionnaires en démontrent les incertitudes : au plan de l’application future, le non-respect des engagements peut se reproduire comme pour les fonctionnaires !
Le recours à la grève permet de montrer que pour certaines professions, le blocage des indices de rémunérations, a conduit à ne plus pouvoir recruter : enseignement et hôpitaux sont directement concernés par un véritable déclassement. Il en résulte de nombreux départs et pire des difficultés dans les recrutements. Les pertes de rémunérations varient entre 20 et 40% du fait même des blocages liés au défaut d’indexation.
En conséquence, le niveau des rémunérations doit être intégré aux réformes à venir des retraites. Cette mise en ordre devient un préalable à la réforme, puisque le non-respect des engagements pris précédemment, a conduit à minorer les rémunérations, ainsi que les cotisations assises sur ces revenus.
La suite des évènements est dès lors facile à prévoir.
Réforme des retraites : les concessions obtenues par certaines professions
Plusieurs professions ont obtenu des dérogations pour la préservation de certaines spécificités de leur régime de retraite alors que la grève est entrée jeudi 26 décembre dans sa quatrième semaine.
Les hôtesses, stewards et pilotes
Les hôtesses et stewards ont obtenu le maintien de leur caisse autonome de retraite complémentaire, la CRPN, menacée de disparition dans le cadre du projet de fusion des 42 régimes existants. Seuls les hôtesses et les stewards né à partir de 1987 seront concernés par le futur système universel de retraite à points. L'âge de départ à la retraite à 55 ans pour les personnels navigants commerciaux va disparaître progressivement pour les générations nées après 1987, pour converger vers 60 ans.
Côté pilotes, le SNPL France Alpa, syndicat majoritaire et lui aussi membre du collectif SOS Retraites, a obtenu le maintien de la possibilité de partir à la retraite à taux plein à 60 ans et le maintien de la CRPN (caisse de retraite complémentaire) "au-delà de trois plafonds annuels de la sécurité sociale", un référentiel qui permet de déterminer la base de calcul des cotisations sociales.
Les policiers
Les policiers garderont leur régime dérogatoire de retraite. "Dès lors qu'ils occupent des fonctions régaliennes de protection de la population" et "compte tenu des dangers auxquels ils sont exposés", les policiers continueront à "bénéficier des dérogations à l'âge de départ à la retraite", s'était engagé, à la mi-décembre, le ministre de l'Intérieur Christone Castaner. Il s'est également engagé sur un remplacement de leur bonification spéciale, qui leur offre une annuité de cotisation tous les cinq ans, "par une sur cotisation du ministère de l'Intérieur".
Les militaires
"Quand on est militaire, on ne touche pas la retraite, on a une pension. C'est différent", a déclaré Emmanuel Macron lors de sa visite aux troupes françaises en Côte d'Ivoire le 21 décembre. Une manière d'indiquer aux militaires qu'ils ne seraient pas concernés par la réforme envisagée et qu'ils conserveraient leur régime spécial.
Les enseignants
Le Premier ministre s'est engagé, le 11 décembre, à ce que la future pension des enseignants reste "comparable au niveau des retraites des fonctions ou métiers équivalents" dans la fonction publique. Cet engagement figurera dans la loi et les revalorisations nécessaires pour maintenir les niveaux de pensions commenceront dès 2021.
Les aides-soignants
En étendant aux fonctionnaires le "compte pénibilité", réservé aux salariés du privé, et en prenant mieux en compte le travail de nuit, 20 à 30% des infirmiers et aides-soignants pourront partir avant 62 ans, et, au mieux, à 60 ans, a assuré l'exécutif. Autre mesure mise en avant par Matignon, le lancement début 2020 d'une "concertation sur l'aménagement des secondes parties de carrière" à l'hôpital pour instaurer un "nouveau dispositif permettant" un temps partiel sans perte de revenus pour les aides-soignantes en fin de parcours.
Les marins pêcheurs
Le 20 décembre, le Premier ministre Édouard Philippe a promis que la réforme "reconnaîtra les spécificités" des marins qui auront "les assurances qu'ils demandent" sur leur droit à un départ anticipé avant 62 ans.
Les routiers
Le 16 décembre, les routiers ont fait grève pour exprimer leur inquiétude au sujet du congé de fin d'activité (CFA). Ce dispositif leur permet d'arrêter de travailler à 57 ans en touchant 75% de leur salaire brut jusqu'à leur retraite, à 62 ans. La ministre des Transports, Élisabeth Borne, a accepté le maintien du CFA.
Négociations à la RATP et à la SNCF
Le gouvernement a proposé une entrée plus tardive dans le système de retraites à point. La bascule ne concernerait que des personnels nés après 1985 pour les roulants et 1980 pour les sédentaires. Le gouvernement a également proposé des dispositions permettant une amélioration du niveau de pension par rapport à la proposition initiale, tenant compte du mode actuel de calcul des pensions sur les six derniers mois avant la retraite et un lissage en douceur de l'allongement de l'âge de départ.
Le corps de Ballet de l’Opéra
A obtenu la clause du grand-père, mais le personnel la refuse afin de protéger les futures ballerines. « Il nous est proposé d’échapper personnellement aux mesures, pour ne les voir appliquées qu’aux prochaines générations. Mais nous ne sommes qu’un petit maillon dans une chaîne vieille de 350 ans. Cette chaîne doit se prolonger loin dans le futur : nous ne pouvons pas être la génération qui aura sacrifié les suivantes », ont-elles répondu.