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Chute de la France en matière de corruption

par Guy Muller 9 Mars 2025, 16:18 Les articles de Référence

 

La France a chuté à la 25e place du classement de Transparency International sur l'indice de perception de la corruption, un recul de cinq rangs par rapport à l'année précédente. Ce classement, publié le 11 février 2024, marque la pire performance de la France depuis 2011.

Détails du classement

  • Score de la France : 67 sur 100, à égalité avec l'Autriche et Taiwan.
  • Comparaison avec d'autres pays :
    • Danemark : 1er avec un score de 90
    • Allemagne : 15e avec un score de 75
    • Belgique : 21e
    • Soudan du Sud : dernier avec un score de 8

Causes de la chute

Transparency International attribue cette dégradation à plusieurs facteurs :

  • Scandales politiques : 26 ministres ont été impliqués dans des affaires politico-judiciaires depuis 2017, y compris des affaires notables comme le procès des assistants parlementaires du Rassemblement National et l'affaire Bygmalion.
  • Crise de confiance : L'organisation souligne une profonde crise politique et de confiance, exacerbée par l'instabilité politique et le maintien en fonction de ministres mis en examen.
  • Absence de débat public : La lutte contre la corruption a été largement absente des discussions politiques, notamment lors des élections législatives de 2024.

Recommandations de Transparency International

L'ONG appelle le gouvernement français à :

  • Renforcer les moyens du Parquet national financier.
  • Assurer l'indépendance du parquet.
  • Accroître la transparence des interactions entre responsables politiques et lobbies.
  • Rattacher au Premier ministre le pilotage de la politique publique de lutte contre la corruption.

Cette situation est considérée comme un signal d'alerte pour la démocratie en France, qui est désormais classée parmi les "démocraties imparfaites".

Deux nouvelles preuves sur la corruption en France

De récentes décisions et débats judiciaires montrent comment la corruption progresse dans notre pays.

L’affaire LVMH et le rôle de Squarcini

L’arrêt du 7 février 2025 met un terme à l’affaire d’espionnage organisée par Bernard Arnault auprès du journaliste François Ruffin. Cet espionnage au sein du journal Fakir et pendant le tournage du film « Merci patron », a fait l’objet d’une reconnaissance de culpabilité préalable par le groupe LVMH (amende de 10 millions d’euros). C’est une technique judiciaire importée des Etats-Unis qui allège le coût des procès. Toutefois l’inconvénient de cette pratique, c’est que la victime est sortie d’un procès (François Ruffin) sans percevoir aucune réparation de son préjudice.

Le tribunal acte la sanction du groupe LVMH, comme celle du squale, surnom de Squarcini condamné à 450000 euros de dépens. Pour les esprits chagrins, sachez qu’il n’ira jamais en prison sauvé par un bracelet électronique.

Le Tribunal acte « des faits jugés insupportables au corps social ». Le patron des services du renseignement intérieur sous Sarkozy, accusé notamment d’avoir détourné les moyens de l’État au profit de LVMH et d’avoir fait espionner illégalement François Ruffin, a été condamné, vendredi, à quatre ans de prison, dont deux ferme, et 200 000 euros d’amende.

 

La palette des faits reprochés à Bernard Squarcini, 69 ans, et à ses complices est très riche :

avoir utilisé les moyens de l’État du temps de son règne à la DCRI pour le compte personnel du patron de la multinationale du luxe LVMH, le milliardaire Bernard Arnault ;

avoir fait espionner, une fois embauché par LVMH après son départ de la DCRI, le journal Fakir et son rédacteur en chef, le futur député François Ruffin, devenu la bête noire de Bernard Arnault à cause du film Merci Patron ! ;

avoir mis sur écoutes pour des motifs fallacieux un policier qui avait notamment trop fouiné du côté d’intérêts corses liés à Squarcini, en marge de l’affaire du cercle de jeu du Wagram ;

avoir conservé, après son départ de la DCRI, des centaines de documents classifiés portant sur des intérêts nationaux ou sur des affaires sensibles, politiques notamment (Cleartstream, Karachi, Djouhri, Takieddine, HSNC, etc.) ;

avoir obtenu de réseaux policiers amis des informations confidentielles sur une enquête en cours impliquant LVMH et l’un de ses concurrents, le groupe Hermès.

 

Extrait du délibéré . Monsieur Squarcini a délibérément méconnu les règles de la procédure pénale […], détourné les moyens de l’État afin de satisfaire les préoccupations clandestines du représentant d’une personne morale de droit privé [LVMH – ndlr], porté atteinte au secret des correspondances d’un fonctionnaire de police à l’encontre duquel il nourrissait un sentiment de rancœur personnelle [dans l’affaire Wagram – ndlr] ainsi que, devenu ancien préfet et ancien directeur central du renseignement intérieur, conçu et validé un système de surveillance étroite de l’activité des membres d’une association dont l’existence était parfaitement légale [le journal Fakir ndlr], sollicité et bénéficié de la violation du secret professionnel, du secret de l’enquête et du secret professionnel, compromis le secret de la défense nationale et détourné à nouveau les moyens de l’État pour favoriser ses intérêts propres ».

 

La réaction de François Ruffin

S’agissant plus particulièrement de l’espionnage du journal Fakir et de François Ruffin, le tribunal relève que « le droit d’expression collective des idées et des opinions [est] d’autant plus précieux que son exercice est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés ».

À la sortie du tribunal, François Ruffin a réagi en ces termes : « Je ne veux plus entendre de conditionnel : “LVMH aurait fait infiltrer le journal Fakir”, “LVMH aurait fait surveiller François Ruffin”, “LVMH aurait pris des photos de lui et de sa famille” […]. C’est de l’indicatif maintenant. C’était déjà prouvé, c’est désormais jugé. Il y a eu une collusion entre la première fortune de France et le premier flic de France pour faire espionner un petit journal et son rédacteur en chef, qui à l’époque faisait un film de nature satirique. »

 

François Ruffin a été élu député depuis les faits rapportés au procès
François Ruffin a été élu député depuis les faits rapportés au procès
François Ruffin a été élu député depuis les faits rapportés au procès
François Ruffin a été élu député depuis les faits rapportés au procès
François Ruffin a été élu député depuis les faits rapportés au procès

François Ruffin a été élu député depuis les faits rapportés au procès

L’argent libyen et la culture bédouine

Relation d'une séance du procès sur le financement libyen tenue le 6 mars 2025

L’horlogerie suisse a tout déréglé chez Claude Guéant et Alexandre Djouhri. L’ancien bras droit de Nicolas Sarkozy et l’agent de corruption présumé, tous deux prévenus au procès des financements libyens, ont été interrogés, jeudi 6 mars, sur une montre de luxe d’une valeur de 11 300 euros que le premier a reçue des mains du second. On savait déjà que Claude Guéant est soupçonné d’avoir perçu en mars 2008, trois mois après la fastueuse visite de Kadhafi à Paris, un virement de 500 000 euros derrière lequel se cache, d’après l’accusation, un réseau financier occulte animé par Alexandre Djouhri.

 

Un dialogue digne d’une pièce de Courteline

Guéant. Je n’ai pas un souvenir très précis », a-t-il commencé par déclarer à la barre du tribunal. « Lors d’un déjeuner, je lui ai fait observer qu’il avait une jolie montre. Il l’a spontanément détachée et me l’a donnée. Il peut y avoir dans la vie des cadeaux désintéressés », explique l’ancien ministre. En fait l’observation sur la beauté de la montre sera émise par deux fois au cours du repas ! « Alexandre Djouhri ne m’a fait état d’aucune demande de contrepartie. C’est un geste, purement et simplement, d’amitié », poursuit-il.

Combien de rencontres auparavant ? Claude Guéant répond d’une petite voix : « Deux ». La première était un déjeuner au Bristol, au printemps 2006, en compagnie notamment de Nicolas Sarkozy et de Bernard Squarcini, l’homme qui deviendra le chef des services secrets intérieurs par la suite.

« Cela a été une sorte de coup de foudre amical alors. Il s’est passé quelque chose entre vous…, en conclut ironiquement le procureur Dandoy, pour qualifier la relation Guéant/Djouhri.

— Rien ne m’avait été indiqué de défavorable concernant Alexandre Djouhri. Il avait de multiples contacts. Mais je ne savais pas ce qu’il faisait exactement [comme métier – ndlr ], répond Guéant.

A priori, il ne porte pas de Swatch au poignet. Vous voyez bien son train de vie. Donc quand il vous offre une montre, elle a une valeur, non ?

— Elle m’a paru très belle. Mais je n’avais pas connaissance de sa valeur. »

 

Le procureur imagine la scène :

« Donc, vous prenez la montre. Vous voyez qu’il est écrit dessus “Patek Philippe, Genève”. Ce n’est pas une Casio…

— Je n’avais pas conscience que c’était une Patek Philippe !, s’énerve Guéant. — C’est écrit dessus… Mais monsieur Guéant, mes questionnements sont les vôtres. Moi aussi, en tant que magistrat, je dois me demander ce que je peux ou non accepter. Je me mets à votre place. Vous êtes directeur de cabinet du ministre de l’intérieur. Vous êtes en face d’un affairiste. Vous ne l’avez vu que trois fois dans votre vie et il vous remet une montre. Quel est votre questionnement ?

— Moi, je sais que c’est quelqu’un de très introduit dans les milieux parisiens. C’est un ami du premier ministre [Dominique de Villepin – ndlr]. Voilà…

— Mais votre questionnement, quel est-il ? C’était votre anniversaire ?

— Mais l’amitié, aussi, ça existe.

— Vous — Je ne me suis pas du tout posé la question. Évidemment, j’ai protesté. Il a insisté.

— Vous avez dirigé la police nationale. Vous avez été préfet. Vous êtes directeur de cabinet du ministre de l’intérieur au moment des faits. Comment est-ce possible de ne pas avoir de questionnement déontologique. Je peux vous dire que je ne me suis pas posé de questions. C’était un geste d’amitié pur et simple et M. Djouhri n’avait pas mauvaise réputation.

— Ce n’est pas une question de mauvaise réputation. Il fait des affaires, ce qui n’est pas un gros mot. On peut le faire de manière légale. Mais il a besoin d’entretenir un réseau. Mais quels furent les moments si importants vécus entre vous pour qu’il vous offre une montre à 11 000 euros et que vous l’acceptiez ?

— Jamais il n’a été question de contreparties.

Nota. Monsieur Guéant a été condamné dans l’affaire des primes du Ministère de l’Intérieur pour avoir arrondi ses fins de mois au détriment du personnel affecté aux enquêtes. Dans l’affaire des tableaux dont le prix a été multiplié par dix il a été aussi condamné.

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